La décision d’établir un fonds de famille chez Francofonds peut s’expliquer de diverses manières. Dans le cas de notre famille, il est motivé, en premier lieu, par le désir de rendre hommage à Joseph et Marie-Madeleine Balcaen et de poursuivre une œuvre de pionniers au plan culturel et linguistique au Manitoba français. Une vie vécue par nos parents et grands-parents sous le signe de l’amour d’une langue et d’une culture qu’ils possédaient et chérissaient, un héritage à transmettre et qu’ils ont su transmettre avec autant d’amour, d’intégrité et de conviction. Il ne faut pas oublier, surtout, qu’ils ont été de ceux et celles qui ont su mener la guerre à un moment où l’enseignement du français dans les écoles du Manitoba était défendu.
Un coup d’œil en arrière sur l’implication de notre père et grand-père Joseph nous le montre tantôt engagé comme commissaire d’école pour le district scolaire Saint-Joachim de La Broquerie, tantôt impliqué au moment de la grande réforme de la perception de la Part-à-Dieu. Sa vive intelligence alliée à un jugement sûr lui permit d’apprécier l’importance, dans les années trente et de la Dépression, de la mise sur pied d’une Caisse populaire à La Broquerie, une institution dont il fut à tour de rôle secrétaire et président. Il figure au nombre des tout premiers membres et dépositaires de cette Caisse. Il fut actif, aussi, dans l’établissement de la Coopérative de Consommation de La Broquerie, un levier qui a joué un rôle déterminant dans la vie économique de son village. C’est par ailleurs en raison de son long engagement dans ce domaine coopératif que lui fut décerné, au début des années soixante, un certificat de Mérite par la Fédération des Coopératives du Manitoba. Enfin, Joseph Balcaen a participé de manière très réelle et efficace à La Broquerie au moment de la perception menée pour prélever des fonds qui ont permis la création de CKSB, le premier poste de langue française de l’Ouest canadien.
Joseph et Marie-Madeleine Balcaen
Joseph et Marie-Madeleine Balcaen
Notre mère et grand-mère, Marie-Madeleine, issue d’une famille immigrée de France en Saskatchewan au tournant du siècle dernier, était imbue d’une belle et profonde culture. Son amour de la langue française qu’elle maîtrisait si bien ne pouvait faire autrement qu’influencer ses enfants et ses petits-enfants. Elle a su mettre à profit pour sa communauté, également, ses dons de musicienne, d’abord, par les services d’organiste de la paroisse de La Broquerie pendant une période d’une vingtaine d’années. Puis, suivant son déménagement à Saint-Boniface, ce fut au tour de l’Association des Aînés, la Fédération des aînés franco-manitobains de profiter de sa générosité et de ses talents. Elle servit, notamment comme secrétaire à l’exécutif de la FAFM pendant neuf ans. À Saint-Boniface, toujours, elle fut membre de la Chorale des Aînés « Partage de Bonheur » pendant plusieurs années. Enfin, toujours comme témoignage de son engagement pour sa culture, elle fit partie du comité de préparation du recueil intitulé « Nos chansons ou Le Manitoba chante encore » publié en 1983.
Nous voulons mettre sur pied un fonds en la mémoire d’un couple qui a vécu à un moment ou « lutter pour ses droits » n’était pas uniquement un concept abstrait. Nos parents nous ont donné l’exemple en s’engageant au plan humain et financier, en donnant de leur argent et de leur personne pour « la cause » comme on disait souvent à l’époque. Nous remercions ceux et celles qui se sont déjà engagés dans ce nouveau fonds de famille et nous invitons les enfants et petits-enfants qui désireraient honorer leur mémoire et continuer leur œuvre à participer au Fonds. Leur profond engagement en faveur de la francophonie aura servi à ériger, au sein de leur propre famille, un puissant rempart contre les ravages de l’assimilation, l’ennemi qui mine les minorités francophones au pays. Nous pensons qu’il n’y a probablement pas de meilleure façon de continuer l’œuvre magnifique de celui et celle qui nous ont donné l’exemple qui nous ont tracé la voie.
Le fonds mis sur pied en l’honneur de Joseph et Marie-Madeleine Balcaen en 2002 a comme mission d’appuyer la communauté là où est le plus grand besoin. Le partage et le souci des personnes en quelque besoin sont des qualités qui ont toujours fait partie prenante des valeurs de Joseph et Marie-Madeleine. Il est tout à fait approprié que le fonds se penche vers des causes de justice sociale qui existent dans notre société, ainsi que de l’appui à la santé et la santé mentale. Ces précieuses personnes tenaient aussi à cœur de voir fleurir leur bel héritage francophone de génération en génération, par le biais de la promotion de ce fonds auprès de leurs descendants.
Famille Balcaen en 2015
Martin Balcaen et Joelle Boisvert, responsables du fonds